Mémorial soviétique au Tiergarten ou des soldats russes à l'Ouest.

Le lieu et la construction du monument.

Le 8 mai 1945, le IIIème Reich capitule sans conditions. Le pays est entièrement occupé par les vainqueurs, les USA, la Grande-Bretagne et La France. Berlin, situé en zone soviétique, est également partagée. Les soviétiques ont payé un lourd tribut pour conquérir l'ancienne capitale du Reich avec environ 80 000 morts et 280 000 blessés. Ils souhaitent ériger un mémorial là où eurent lieu les derniers combats. Ils choisissent un espace dégagé dans le Tiergarten, non loin de la porte de Brandebourg et du Reichtag. Cet endroit fait partie du secteur britannique, mais l'ensemble des alliés occidentaux n'y voit pas d'inconvénient ou d'incohérence. Ils donnent leur accord et les travaux débutent rapidement. Certains plus tard, y verront en fait une première tentative des soviétiques de convaincre, de manière contournée, les britanniques de quitter leur secteur d'occupation.

Le mémorial

 C'est l'œuvre de l'architecte Mikhaïl Gorvits. Il  présente la forme d'une colonnade courbe surmontée d'une imposante statue en bronze due aux sculpteurs Vladimir Tsigal et   Kerbel. Celle-ci représente un soldat soviétique, le bras gauche tendu vers le sol afin de symboliser la chute du Nazisme mis à bas par l'Armée rouge, la négation du salut fasciste levé . Une inscription en russe sous la statue du soldat se traduit ainsi : Gloire éternelle aux héros tombés dans la bataille contre les occupants fascistes allemands pour la liberté et l'indépendance de l'Union soviétique ! La statue repose sur un piédestal en marbre de Nikolaï Serguieïev. Sur les piliers de marbre du mémorial, sous les couronnes d'or de la victoire, la liste des groupes de l'armée soviétique qui ont combattu lors de la bataille de Berlin. Sous chaque groupe figurent les noms et les âges des généraux tombés au combat. 

Le monument est flanqué de deux canons obusiers ML-20-152 mm, ainsi que de deux chars T-34, les premiers, dit-on,  à avoir pénétré dans la ville à l'issue de la bataille. Derrière le mémorial, se trouve un cimetière militaire, où reposent près de 2500 combattants soviétiques.

Plus de quarante années de présence soviétique à l'Ouest.

Le mémorial, sera rapidement achevé, puis inauguré le 7 novembre 1945. Chaque année le 9 mai (Pour les soviétiques, en raison du décalage horaire, la capitulation est célébrée le 9 mai et non le 8) une cérémonie du souvenir est organisée. Elle est toujours d'actualité, avec l'unique présence maintenant d'anciens combattants ou de leurs familles. Une garde permanente par deux soldats, parfaitement immobiles, quelque soit le temps ou la température, les curieux, tenus à distance par des barrières, va durer jusqu'en 1993 et le retrait de toutes les troupes soviétiques stationnées en RDA. Afin d'assurer la rotation des gardes, un baraquement sera édifié de l'autre côté de l'avenue, discrètement au milieu de la végétation du parc. les berlinois pourront assister, médusés ou outrés, à la relève régulière du contingent, défilant en ordre face à la porte de Brandebourg, sur Unten der Linden, maintenant rue du 17 juin, à la mémoire des victimes lors des révoltes ouvrières et populaires de juin 1953 contre le pouvoir communiste en place et durement réprimée par les forces soviétiques,

Des manifestations, les premières années, pendant le blocus aérien puis  après la construction du mur, auront lieu régulièrement. La police de Berlin-Ouest sera en permanence sur les lieux, renforcée par des patrouilles de l'armée britanniques. L'accès routier sera interdit, les barrières devant le monument érigées ou réduites en fonction des risques de provocations ou de contestations. Des incidents plus grave comme celui commis par un néo-nazi qui, en 1970, blesse mortellement l'une des sentinelles. Dans les années 80, bien que l'avenue soit toujours interdite à la circulation, les bus touristiques sont autorisés à faire une petite boucle devant le mémorial sans que les passagers en descendent, juste le temps de la photo!

De nos jours.

Déserté par les sentinelles, les barrières retirées, le monument est accessible sans contrainte. Il n'y a pas globalement d'atteintes sauf en 2010 où juste avant les célébrations de la Journée de la victoire en Europe, le mémorial est vandalisé avec de la peinture rouge portant la mention "Voleurs, meurtriers, violeurs".

Anecdote.

Lors de travaux de sondages dans le parc en 1967 pour une nouvelle ligne de métro, trois tunnels autoroutiers de près de 220 mètre de longueur sont découverts. c'était l'esquisse d'un axe "Nord/Sud" qui devait s'inscrire dans le vaste programme de Germania, capitale du monde pour Hitler et son architecte Speer. Cette axe était en grande partie souterrain afin de ne pas gêner la circulation piétonne sur l'immense avenue bordée des bâtiments tout autant gigantesques du projet. La guerre va interrompre le creusement et l'aménagement des tunnels. Ils seront même oubliés presque une trentaine d'années.